Hier j'enfile un DVD dans le lecteur, et quelle n'est pas mon émotion en entendant une voix que j'ai écoutée mille fois avec ferveur sur FC.
Mais je n'avais jamais vu Anouk Grinberg. Je l'ai donc découverte, comme si je l'avais eu observée avant de la rencontrer, ainsi que le fait prétendument Dorante d'après Dubois.
J'étais dans le temps de la pièce, dans le mouvement, c'était charmant. On devrait toujours préparer les gens, par un conditionnement de leur vie réelle, aux pièces de théâtre qu'ils verront. J'ai bien entendu fait durer le plaisir tout le temps de la pièce avant de lire la jaquette :)
Tant qu'on est dans le registre amoureux, cette vidéo sur laquelle j'aimerais revenir.
Pourquoi analyser, pourquoi ne pas se contenter de jouir ? C'est une vraie maladie mais tant pis allons-y.
D'abord il y a, certainement lui, le cameraman. Chorégraphie improvisée, il est donc parfois surpris par les mouvements de la danseuse, et la caméra suit avec retard.
Un jardin en terrasse. En Provence ? J'aime à le croire. La licence des années 70 se hume comme le parfum de l'eucalyptus, et j'aime à le projeter. Il y a eu un petit montage, au moment où elle ôte son costume de panthère. Avec ses émouvantes oreilles.
A elle maintenant. Danseuse non accomplie, mais non débutante. Utilisant la sensualité de son corps, la coule dans les figures de la danse.
Elle est sérieuse sur sa danse. Son propos est bien de danser. Mais elle est femme, et son corps de femme suit les ondulations qui disent mieux que le peu de danse qu'elle sait. C'est ça qui est émouvant aussi, et cette petite musique un peu grinçante.
Ses mouvements sont répétitifs, et son répertoire est limité, mais soudain, cette souplesse qui parcourt son corps du haut en bas d'un seul jet...
J'aime que sa silhouette se fonde parfois à la végétation, j'aime ce que je crois, qu'au cours de la vidéo, avec le temps, elle s'habitue à la caméra, elle se lâche un peu, c'est plus fluide. J'aime cet ennui qui nous prend à la fin...
Sans doute qu'un jour là-haut-là-bas, je serai, appuyée sur le muret de pierres sèches, les mains écrasant les feuilles de lauriers cassantes et les petites boules dans le mica, et je l'applaudirai.
Que c'est bête, ces sentiments, pouah, on dirait du XIXème. Je suis d'ailleurs étonnée à ce propos par le texte de la Seconde Surprise. C'est dense, quand je pense que ce fut donné en 1727. Dense, je veux dire, ça travaille une zone restreinte des affects. C'est marrant d'ailleurs, cela m'a fait penser à In the Mood for Love, comme si par delà les temps et les espaces, ce thème était un meuble résident du discours amoureux.